Nîmes : la gauche galvanise la foule en vue de 2026

vendredi 20 juin • 16:50
Environ 700 personnes ont conversé d’un projet commun pour Nîmes, sous l’égide du collectif de gauche "Nîmes en commun" porté par l’opposant Vincent Bouget.

Hasard du calendrier ou manœuvre pour chiper les journalistes ? La Ville de Nîmes organisait sur le même créneau, jeudi 19 juin dernier, une cérémonie récompensant ses sportifs de l’année aux jardins de la Fontaine… Du côté de la halle des sports mobilisée par la gauche, l’on pointe avec sarcasme les moyens alloués. « L’équipement a coûté cher, mais la Ville n’a pas prévu plus de micros, nous en avons qu’un seul pour plus de 700 participants… », tacle Laurent Sablic, animateur de la soirée et directeur associé de l’agence Grand Public.

Environ 700 personnes réunies à la halle des sports de Nîmes sur invitation du collectif Nîmes en Commun. Photo : Linda Mansouri

Point d’orgue de 30 réunions

Un exercice minutieusement orchestré dans une vaste enceinte, le micro voyageant au gré des interventions spontanées. L’objectif affiché ? Placer la concertation citoyenne au cœur de la démocratie locale. Solennel et ému face à l’assemblée en clôture de réunion, le chef du collectif, Vincent Bouget, ne manque pas d’écorcher l’exécutif nîmois. Le voilà fustigeant des « dérives claniques et un pouvoir centralisé opaque considérant que la ville est sa propriété », le tout dans une logique de fonctionnement « courtisan ». Le même de regretter le « degré de déconnexion entre les élus nîmois et la population ».

Environ 700 personnes réunies à la halle des sports de Nîmes sur invitation du collectif Nîmes en Commun. Photo : Linda Mansouri

Faire société avec les « centre-villistes »

Un constat ayant conduit à trente réunions dans toute la ville de Nîmes, regroupant plus de 1800 habitants. « Si je vous dis Nîmes ? », c’est la question posée par le collectif Nîmes en commun (PS, le PCF, EELV, Ensemble, le PRG, Génération.s et Place publique) à une centaine de Nîmois, dont les réponses ont permis un court-métrage de vingt minutes. Ils sont enseignants, étudiants, écoliers, entrepreneurs, sans emploi, médecins, animateurs sociaux… Tous se sont livrés sur leur amour de la cité, leurs craintes, leur espoir, et leurs propositions pour faire société.

« Il y a deux villes »

Lorsque le micro lui est tendu, Jacques, médecin retraité, saisit l’opportunité. « Il y a deux villes, celle pour le touriste, l’autre pour l’habitant. Je suis bénévole au Secours populaire, environ 90 personnes viennent manger chaque jour… Les Palais des congrès, laissons-les aux grandes villes, Nîmes a d’autres urgences », propose-t-il. Applaudissements nourris. Dans cette ville où environ 30% vivent sous le seuil de pauvreté, Alexis, médecin dans un quartier prioritaire et membre du collectif, insiste : « mes patients sont pour la plupart précaires, il nous faut recréer du lien ». Une nécessité impérieuse alors même que certains jeunes du Chemin-Bas appellent les habitants du centre-ville les « centre-villistes », souligne un contributeur au débat. Une appellation qui prêterait à sourire si elle n’en disait pas long sur notre fragmentation.

Environ 700 personnes réunies à la halle des sports de Nîmes sur invitation du collectif Nîmes en Commun. Photo : Linda Mansouri

« Vous avez vécu une aventure démocratique extraordinaire »

A l’image des gilets jaunes et des cahiers de doléances enfin rendus accessibles au public, les contributions des Nîmois ont été mises en lumière par Frédéric Gilli. Économiste et professeur à Science Po Paris, ce Nîmois d’origine est submergé par l’émotion : « vous avez vécu une aventure démocratique extraordinaire. J’ai analysé un million de signes, soit 950 pages de verbatim ». Constat : les propos des Nîmois sont majoritairement empreints d’inquiétude, suivis d’une certaine frustration, d’une fierté pour la cité et enfin d’espoir. « Quand je fais ce genre de travail, généralement les quartiers sont mis en relation avec la ville. Là, on a l’impression de villes posées les unes à côtés des autres. On a le sentiment d’une ville éclatée« , analyse l’économiste.

Logement, sécurité, culture, social, emploi

Cadre de vie, logement, pauvreté, sécurité, vie sociale et culture, solidarité, autant de préoccupations partagées dans chacun des quartiers. Fatalement, le dérèglement climatique oriente le verbatim des habitants. Une ville trop « minéralisée », « l’une des plus chaudes de France », couplée à un plan de mobilités douces qui laisserait perplexe. « A vélo, tu risques ta peau », tranche un habitant. Le manque de logement et d’emploi est souvent mentionné, tout comme « le peu d’accompagnement de la municipalité en aide technique, logistique, et financière, au tissu social et culturel ». Quid de l’insécurité ? « Il faut plus d’éducateurs dans les rues, la vidéosurveillance seule ne suffit pas », relate-t-on des échanges.

« Il ne s’agit pas d’imiter Montpellier »

Un constat implacable ressort de ces quatre mois de terrain : « la difficulté à se projeter dans l’avenir de la ville. La grande majorité des habitants ne voit pas d’horizon commun », expose l’élu d’opposition communiste Vincent Bouget. Lequel rappelle que la « carte postale peut rendre fière, elle ne dit pas pour autant les conditions de vie ». Le vice-président du Département nuance pour autant : « il ne s’agit pas d’imiter Montpellier, mas d’inventer notre propre avenir, de fédérer les énergies. Surtout, de ne pas prendre les Nîmois pour des imbéciles… ». Vincent Bouget, pour l’heure non déclaré aux municipales, reste déterminé : « si nous gagnons en mars prochain, l’aventure ne fera que commencer ». Un questionnaire sera distribué aux habitants en automne prochain, visant à identifier les priorités.

Linda Mansouri/InfOccitanie.