La corrida occupe une place importante en Occitanie : sur les 52 villes françaises accueillant des corridas ou novilladas dans des arènes, 21 sont situées dans cette région. La Chambre régionale des comptes s’est donc penchée, dans un rapport, sur les soutiens publics accordés à la corrida, thème proposé lors de la campagne 2023 de participation citoyenne. Pour réaliser cette enquête, elle a contrôlé un échantillon de six communes accueillant des corridas et novilladas : Nîmes (30), Béziers (34), Vic-Fezensac (32), Céret (66), Saint-Gilles (30) et Bellegarde (30).
Des « soutiens modestes »
Les corridas et novilladas sont organisées par des acteurs privés, sociétés ou associations. La Chambre s’est notamment intéressée aux soutiens financiers apportés par les communes et intercommunalités aux organisateurs. D’après le rapport, ces soutiens « restent modestes ». La CRC les estime à 19 000 euros en moyenne par commune, soit 0,12 % de leurs charges de gestion annuelles. Toutefois, des disparités sont relevées selon les communes. Entre 2019 et 2023, la Ville de Béziers a engagé 103 000 euros de dépenses nettes en faveur de ces spectacles, tandis que Nîmes a perçu une recette nette de 24 000 euros sur la même période.
Un secteur déficitaire
« Le secteur d’organisation de spectacles de corrida connaît des faillites et des reconfigurations », affirme Valérie Renet, présidente de la CRC. En effet, les charges liées à l’organisation de ces événements sont en hausse et ne sont pas couvertes par les recettes de billetterie, la fréquentation étant en baisse. « Si la fréquentation des spectacles, en diminution jusqu’en 2019, connaît un regain depuis, elle reste néanmoins faible, s’établissant au mieux à un peu plus de la moitié de la jauge des arènes », indique la CRC. Parmi cette jauge, sont incluses des places achetées par les collectivités pour les « élus, institutions et autres collectivités », précise-t-elle. Cette situation déficitaire « met en difficulté les organisateurs ».
Quid des férias ?
La Chambre s’est également attardée sur les férias, fêtes populaires du Sud de la France, qui accueillent généralement des manifestations taurines. Même si les férias et la tauromachie espagnole (corrida et novillada) présentent des similarités, leurs coûts et retombées divergent. Du côté des coûts d’organisation, ils s’élèvent en moyenne à 380 000 euros par commune en 2023, selon l’échantillon étudié. À Nîmes, les moyens financiers engagés sont « 20 fois plus importants pour l’organisation des deux férias que pour celle des spectacles tauromachiques » : entre 2019 et 2023, la ville a dépensé 1,08 million d’euros pour les férias contre 53 200 euros pour les spectacles tauromachiques. La Ville de Béziers, quant à elle, a consacré 1,5 million d’euros à la féria en 2022 et 2023, tandis que l’aide à la tauromachie espagnole est estimée entre 42 000 et 91 000 euros, soit entre 3 et 6 % du budget total.
Même constat du côté des spectateurs, bien plus nombreux lors des férias que pendant les corridas. « Il est vingt fois plus important à Nîmes ou Béziers, deux fois plus important à Vic-Fezensac », précise le rapport. Ainsi, les retombées économiques des férias sont significatives, même si la CRC reconnaît « qu’elles restent difficiles à évaluer », et que « celles directement liées à la tauromachie espagnole restent faibles. »
Comment survivre ?
Au regard de ce constat, la question de la survie de ces événements se pose. Pour la CRC, plusieurs raisons expliquent la persistance de la tauromachie espagnole malgré son déficit. Tout d’abord, certains organisateurs sont présents dans d’autres pays, comme l’Espagne, où ces pratiques restent populaires, ce qui permet un certain équilibre financier. Certaines communes choisissent également d’augmenter leur participation, comme à Saint-Gilles où les aides sont passées de 40 000 à 60 000 euros par an. Enfin, les réserves financières accumulées durant les années fastes permettent à certaines structures d’accepter un déficit temporaire. Toutefois, la CRC s’interroge « sur la pérennité de ce modèle ».