Midi Libre, France 3 Occitanie et plus récemment Mediapart ont relayé des faits graves survenus en 2021, au sein de la caserne de sapeurs-pompiers de Gigean, dans l’Hérault. Contacté par nos soins, le SDIS 34 n’a pas donné suite à nos sollicitations. Plusieurs preuves ont été recueillies dans un rapport interne, établi en 2024 par le chef de centre, que France 3 Occitanie a consulté.
Un jeune sapeur-pompier volontaire d’origine maghrébine, âgé de 18 ans au moment des faits, passionné par la profession, a fait l’objet de propos racistes et de harcèlement. Trois hommes sont impliqués, dont un policier municipal également sapeur-pompier. Contactée, la Ville de Gigean indique que le policier municipal en question ne fait pas partie de ses effectifs. Dans son article, Mediapart livre quelques informations supplémentaires sur le profil des pompiers responsables des agissements. La victime a, depuis, renoncé à son engagement pour les secours.
« 10 ans mais voilà le cul »
Selon ce rapport relayé par France 3, neuf preuves sont recensées. Des agissements observés sur les réseaux sociaux ou filmés par leurs auteurs eux-mêmes. Tous ont agi à l’encontre du jeune sapeur-pompier d’origine maghrébine. Sur un post de messagerie d’un réseau social, on peut voir une photo de la jeune sœur du sapeur-pompier posant devant un camion de la caserne et des propos tels que « elle a une bonne bouche » ou encore « 10 ans mais voilà le cul ». Des propos envoyés alors que le jeune soldat du feu est aussi en ligne.
« Les arabes n’ont aucun droit à part celui de la fermer »
Toujours dans ce rapport mis en lumière par France 3, une autre conversation contient les propos suivants : « en plus de baiser ta sœur, je vais la baiser avec toi à côté pendant que tu t’auto-suceras. Bâtard, tu es mort ». Au cours d’une discussion, d’autres propos insultants sont partagés : « je vais te baiser toi, ta mère, ton père et ta sœur », puis « d’arabe de mort » ou encore « tes ancêtres les trisomiques ». Dans une autre discussion, il est question de défier le jeune sapeur pompier volontaire. Ce dernier répond qu’il est en droit de refuser, ce à quoi on lui rétorque : “les arabes n’ont aucun droit à part celui de la fermer ».
Un sapeur-pompier, également policier municipal, est filmé en train de menacer avec son arme de service la victime, alors que celle-ci se trouve au sol. Le jeune sapeur-pompier est, dans une autre vidéo, menacé avec un couteau s’il ne prononce pas les mots : « j’encule ma sœur, j’encule ma mère ». La victime sera aussi photographiée, attaché avec les menottes de policier.
La victime attachée avec des menottes
Toujours selon le rapport mentionné plus haut, un sapeur-pompier reproduit une attestation de sortie lors du Covid, en inscrivant « le bougnoul de ses morts » à la place du nom du jeune soldat du feu victime. Un photomontage est réalisé mettant en scène la sœur de ce dernier, âgée de 10 ans, dans une posture à caractère pornographique. Un cliché dans une conversation montre un jeune homme noir, visiblement mort, avec une plaie béante dans le crâne. Un cliché associé au nom du jeune sapeur-pompier.
Procédure en cours
Les faits se seraient déroulés en 2021 et ont été dénoncés, dans la foulée. En 2024, après une enquête interne, le chef de centre auprès du Contrôleur général rédige un rapport qu’il adresse au chef de corps du Sdis de l’Hérault, sous couvert du Chef de Groupement et du Chef de Compagnie.
Dans les colonnes de France 3 Occitanie, le directeur du Service départemental explique que la procédure suit son cours : « Je condamne ces faits. L’enquête interne a été diligentée et demandée par la direction du Sdis. Le principal mis en cause a été muté de la caserne depuis plusieurs années et je l’ai reçu pour lui notifier qu’il passerait en conseil de discipline ». Un conseil de discipline est prévu prochainement.
Le sénateur Hussein Bourgi écrit au Procureur de la République
Le sénateur de l’Hérault, Hussein Bourgi, a rapidement réagi : « J’ai pris connaissance avec consternation et colère des faits qui se sont déroulés dans la caserne des sapeurs-pompiers de Gigean. J’ai une pensée pour la victime, à laquelle j’apporte tout mon soutien.(…)J’assure également tous les sapeurs-pompiers de l’Hérault de ma sympathie et de ma confiance. Dès lundi je vais donc écrire au Procureur de la République de Montpellier pour lui demander que l’enquête judiciaire soit réalisée avec célérité et efficacité ».
Le sénateur précise par ailleurs : « Ce n’est pas parce les faits sont anciens, ou que la victime principale n’a pas porté plainte, qu’il faut relativiser ou minorer les actes racistes, attentatoires à la dignité humaine et à caractère pédopornographique dont la presse se fait l’écho. Les deux enquêtes (administrative et judiciaire) peuvent avoir lieu concomitamment. Les sanctions judiciaires et administratives pouvant parfaitement être cumulatives. J’y veillerai scrupuleusement ».
Kléber Mesquida, président du Conseil départemental de l’Hérault : « Je condamne avec force les faits reprochés »
Kléber Mesquida, président du Conseil Départemental de l’Hérault, a également réagi : « Je condamne avec force les faits reprochés, ayant eu lieu dans une caserne de l’Hérault, qui sont d’une extrême gravité et d’une indignité absolue. La direction du SDIS a diligenté une enquête interne suite au signalement effectué par la voie hiérarchique, et qui doit se clore dans les délais les plus brefs. La justice sera saisie immédiatement afin de donner les suites les plus fermes face à ces comportements. L’engagement au service du secours à la personne ne peut tolérer un seul instant en son sein, la violence, la haine de l’autre, le racisme, des propos ou des actes intolérables ! ».


